une langue rouge




Mille bris
Je suis mille bris et l’étonnement de cette diffraction
Je suis la seconde où j’explose en ces mille bris
Je suis le néant sourd et sombre qui suit cette seconde
Je suis le monde rendu à mille bris

une langue rouge

Un ange de plâtre bat des cils. Les vagues figées des lourdes boucles de ses cheveux dessinent un ciel déchaîné. Le regard de porphyre plante celui qui le croise et l’accule au tourment des Orients. Quelle goule se cache là-derrière, tapie dans une fièvre de fournaise ? Le porphyre brille, la lèvre est d’argent et l’épaule frêle est émouvante. 

lèche d’un amour rouge

Elle a le profil du Sphinx. Elle est l’Egypte. Elle est l’éternité.  Elle est aussi la fragilité et l’impondérable. Atlal.

le sel du désir
lécher l’épaule aimée
brune des saveurs du soleil

Le jeune Cairote ne savait pas et ne pouvait savoir. Torse nu et vêtu d’un boxer en acrylique garance, il faisait face à l’éternité sans se douter le moins du monde que déjà il était du côté des dieux. Pas de sourire. Pas de profondeur dans le regard. Les lèvres mauves fermées dans une bouderie amère. Les épaules minces et la mélancolie affaissant sa poitrine brune et ferme. Il était le vide et se laissait traverser par la beauté du chant. Atlal.

Parcourir les îles purpuraires…

Seul le vent savait ces couleurs

Chair à nue

Balayé des rouges

Carmin de l’air

Donne moi ma liberté
Lâche donc mes poignées

C’est là que devrait intervenir Jean Genet. Il arrive dans ce Cheminement bras dessus bras dessous avec Querelle, les deux hommes plus mâles que jamais et pleins de désir confus pour la bite lourde de Nono, riant de leurs futures traîtrises et de tous les crimes qu’ils commettront. Se méprisant chacun pour connaître la passion dévorante de l’autre pour les mêmes chibres tendus, ils allaient pourtant comme deux vieux amis en confiance entre les lignes du récit… Jusqu’à quelle ignominie perpétrée ? Ehehehehehe !

cette langue reptile
décidée et érectile
qui s’immisce derrière l’oreille
mouille le cou
caresse le dos noueux
le grain ferme de la peau
rit de l’évidence du plaisir
et d'une petite morsure


(extrait de mon livre-poème Je n'étais pas là (Cheminement I - Fragments et débris), éditions Al Manar, Paris 2017 - www.editmanar.com )



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