Je n'étais pas là (extrait IV)
Orage d’étoiles
Déflore le vol
Orpailleur des firmaments
(Trois marins à quai visitent les
allées fleuries où l’automne dore les haies de sa chaude agonie. Curieux et
inquiets, ils cherchent. Une quête d’objets de plaisir où ils pourront déverser
avec violence et des cris de joie et de peur le trop-plein de leur amour.
Ejaculer, vite ! La tête chafouine du petit roux tourne dans tous les
sens, décidée à dénicher et à trouver. Un terrier, un gîte, une tanière où
bourrer, vite, laminer. Les trois lascars à peine amarrés savaient qu’il leur
fallait coïter au plus près. Le plus jeune fume nerveusement, chapeauté d’une
casquette aux blasons brillants. Le plus âgé déjà se caresse le pénis à travers
la poche de ses pantalons, dont la braguette commence à gonfler et tirer sur la
toile de tergal. Violer, vite, forcer, forer, entrer, éclater. Mettre la main,
la tête, les lèvres, la langue, le poing et le bras, les trois braquemarts et
toutes leurs couilles dans le premier trou qui passe. Ejaculer, encore et
encore, vite. Dans les allées aux fleurs dorées par l’automne, les trois marins
sont prêts à tuer pour mieux aimer. Le vieux marin au regard âcre du début de
ce récit, sur ses terres aux bords de ses mers, suit de loin ce jeu d’enfants
et rit de tant de naïveté. La mort en amour se prépare, il le sait très bien,
lui le solitaire).
Paillettes de nue / Voûte dénudée / Naphte
incandescence
And suddenly, I felt nothing
Trois orpailleurs argentés
Habillés de
paillettes et d’étincelles
Plient ploient et
vacillent
En un fandango de
flammèches
Efféminés et
fuyants
Comètes
d’artifices
Attendent leurs
marins mâtins
Ploient et
soupirent dans ce jeu d’ego
S’offrent
expiatoires
A qui souffre
douleur et crépite joie
Dans les sombres
nuits des ports d‘ennui
Respire
profondément
Bleuté du geste
Avec eux est le
souffle
Riders on the storm
Pendant ce temps, le jeune arabe coiffé
d’un keffieh rouge enroulé à l’afghane autour des généreuses boucles noires de
sa chevelure, dans les trépidantes brumes de la révolution, ployait la tête.
Pas par soumission, loin de lui cette idée. Par tactique de combat. Il est une
absence dans l’air rougi par la violence. Un ailleurs penché sur ses propres
abysses. L’ambiance est ténue et prête à rompre à chaque seconde en un fracas
d’acier et de feu. Le monde est jet de pierres. Granit bondissant. Eclats de
silices. Le jeune arabe ploie son visage vers l’asphalte et se dit qu’un jour
il gagnera. Une immense publicité pour Coca-Cola le somme d’être heureux. L’air
est rouge et le keffieh flamboie.
Piétiner autour de la pierre noire
La masse humaine
Seul et piétiner
Hécate
parcourt la baie
Toccata
(extrait de mon livre-poème Je n'étais pas là (Cheminement I - Fragments et débris), éditions Al Manar, Paris 2017. Dessin de Mounat Charrat)
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